A un peu plus de six mois de la Présidentielle de 2024, tout est encore sombre sur l’avenir d’Ousmane Sonko, dont le parti est dissous, alors qu’il est en prison et radié du fichier électoral. Pendant ce temps, les cartes semblent être redistribuées au sein de la coalition «Yewwi Askan wi » où certains candidats pourraient se positionner pour s’adjuger l’électorat de l’ex-Pastef.
Au sein de ’’Yewwi Aska wi’’, principale coalition de l’opposition, les rebondissements s’enchaînent : Le mouvement ‘Taxawu Senegaal’’ est exclu pour « trahison » lors du vote du bureau municipal de la Ville de Dakar. Ce, quelques jours après que le président de la République, Macky Sall, a prononcé la dissolution de Pastef pour « appels à des mouvements insurrectionnels ». Pendant ce temps, le leader dudit parti, Ousmane Sonko, est placé sous mandat de dépôt pour divers chefs d’inculpation avant d’être radié des listes électorales.
Alors, quel candidat pourrait bénéficier de l’électorat de l’ex-Pastef à la prochaine présidentielle ?
Interpellé sur la question, Mamadou Sy Albert pense qu’il est encore très tôt pour le moment d’envisager une présidentielle sans Ousmane Sonko, encore moins le Pastef. Cette désormais ex-formation politique, d’après lui, malgré l’emprisonnement d’Ousmane Sonko et l’acte de dissolution, garde toujours l’avenir devant lui. « Un parti politique peut toujours prendre les habits d’un autre parti et choisir un candidat sous son label », rappelle l’analyste politique, qui « (voit) mal comment on pourrait empêcher le Pastef d’avoir son candidat ».
Il ajoute, tout de même, que les responsables de l’ex-parti peuvent se mobiliser autour d’un candidat. « Après avoir constaté que le leader de Pastef ne peut plus être candidat, les responsables du parti peuvent se réunir et trouver un plan B. c’est très fort possible », a-t-il expliqué. Et en cas de non-participation d’aucun proche du maire de Ziguinchor, il sera question de voir quel est le meilleur candidat pour Yewwi Askan Wi. « Ils peuvent, dans le meilleur des cas au sein de la coalition, discuter pour trouver un candidat unique et consensuel capable de porter le projet de Pastef », a-t-il soutenu, soulignant qu’il y a des similitudes, une même vision.
Guy Marius Sagna, « sosie » de Sonko
Mamadou Sy Albert de préciser, toutefois, qu’«il n’y a pas quelqu’un qui pourrait prétendre être le candidat de Pastef », jurant que pour le moment, l’électorat du Pastef reste intact. « Avant de parler d’électorat, il faut d’abord parler des militants du Pastef, je les vois mal ces derniers aller soutenir un autre candidat autre que le leur. C’est un électorat qui attend le mot d’ordre de la direction et d’Ousmane Sonko. Même en prison, le maire de Ziguinchor peut donner une consigne, en aidant son parti à gagner”.
Pour sa part, le journaliste Hamath Kane ne croit pas qu’Ousmane Sonko soutiendra un candidat autre que celui qu’il désignera dans son parti. Autrement dit, le plan B, qu’il refuse d’entendre, ne devrait venir que de son ex parti. Qui ? Le rédacteur en chef de Bes bi/ Le jour pense que Guy Marius Sagna est un sosie en presque tout du maire de Ziguinchor : Courage, paladin du patriotisme, nationaliste… ». Et s’il y a une revanche à prendre sur Macky Sall, faute d’être au rendez-vous du 25 février, Sonko verrait bien un empêcheur de gouverner et de tourner en rond comme Guy Marius Sagna, l’autre enfant turbulent pour le régime », a-t-il expliqué, ajoutant, que même si dans la galaxie Pastef, beaucoup parlent de Birame Souleye Diop, Bassirou Diomaye, entre autres, le député et activiste peut être la surprise du chef.
« N’oublions pas qu’Ousmane Sonko -et ses hommes l’ont répété plusieurs fois- est convaincu que même Barthélémy Dias a surfé sur son aura politique pour être maire de Dakar. Donc, celui-là se dit : pourquoi pas un des miens ? Étant entendu que le vent d’un dégagisme pourrait souffler quel que soit le candidat de Macky Sall. Et que tous ceux qui ont participé au dialogue -qui a rétabli Karim Wade et Khalifa Sall-, sont contre Ousmane Sonko. Sous ce rapport, le maire de Ziguinchor ne chercherait pas son cheval ».
Redouter un Khalifa Sall bis ?
Notre interlocuteur souligne, toutefois, que dans l’hypothèse d’une consigne de vote en faveur d’un des alliés de Pastef, il y a, au contraire, un risque de démobilisation des militants de l’ex Pastef. « Il y a quand même plusieurs candidats déjà au sein de Yewwi Askan Wi : Malick Gakou, Dethie Fall, Aida Mbodj et éventuellement le Pur. A part le partage des combats politiques, il n’y en a pas un seul parmi ces candidats déclarés qui ait une certaine identité avec Pastef. Il y a cependant des fidèles et des hommes de confiance issus du « système ». Chat échaudé (coup de Khalifa) craint l’eau froide. Mais on ne sait jamais avec la réalité politique », conclut Hamath Kane.
Quoi qu’il en soit, trois têtes émergent au sein de Yewwi Askan Wi. D’abord, Malick Gackou, qui bénéficie déjà du soutien du maire de Guédiawaye, Ahmed Aidara, également leader de ladite coalition. Mais une première participation à une élection présidentielle lui permettra véritablement, à l’instar de Khalifa Sall (exclu), de se jauger et d’évaluer son assise populaire. L’homme se rêve en premier président issu de la banlieue. L’ancien ministre du Commerce de Macky Sall, ex numéro deux de l’Alliance des Forces de Progrès (AFP), qui dispose de beaucoup de relais dans les milieux sportifs et artistiques, devra néanmoins faire la preuve de son envergure sur le plan national, pour sa première bataille présidentielle.
Il y a aussi le président du Parti républicain pour le progrès (Prp) Déthié Fall, par ailleurs quatrième responsable membre de la conférence des présidents de la coalition Yewwi Askan wi, dont il est une des « têtes pensantes ».
L’auteur du Plan ‘’PDF’’ (Plan Déthié Fall, à l’origine de l’inter-coalition Yewwi-Wallu lors des dernières Législatives) est l’un des plus proches du maire de Ziguinchor.
Technocrate chevronné, qui s’est transformé en véritable bête politique, Déthié Fall, a été déterminant dans les bons scores de la coalition Yewwi Askanwi à l’issue des dernières élections territoriales et législatives de 2022, même s’il n’était pas candidat. Seul bémol : le jeune leader et ex-député charismatique et d’une rare pertinence, manque notoirement d’une assise populaire à même de lui faire jouer les premiers rôles dans une élection présidentielle.
Enfin, l’ancienne libérale Aida Mbodj est également candidate au sein de Yewwi Askan Wi. Pur produit du « système », celle que l’ex-président Abdoulaye Wade surnommait « la lionne du Baol » est pourtant réputée très proche de son « fils » Ousmane Sonko, d’où son aura au sein des militants et sympathisants de ce dernier. La présidente de l’Alliance nationale pour la démocratie/ and saxal liggeey se fait toujours remarquée quand il s’agit de « défendre » le maire de Ziguinchor, notamment dans ses déboires judiciaires.